Dans la solitude des champs de coton – #CERCLETP

Le 27 janvier dernier à 16h00, les participants du Cercle des Tigres Penseurs assistaient au spectacle Dans la solitude des champs de coton à l’Usine C. Voici les commentaires et interventions de nos participants suite à la percutante proposition de Brigitte Haentjens.
 
Le texte et la mise en scène
« Cela vise le cœur et l’esprit. Cela m’a mis dans un état particulier, je ne pouvais ni être endormi ni être réveillé. Le texte passait quand même et cela dès l’entrée en salle avec la trame sonore, les battements de cœur, ça devient notre propre battement. Tout cela m’a mis dans un état et un niveau de conscience pas habituels, quasi hypnotiques »
Garwood J-G, courtier immobilier
« Le texte est frappant, il y a énormément de figures de style, d’euphémismes, qui veulent dire beaucoup. C’est un constant combat — push and pull —, une mise en scène façon – ring de boxe. C’est un commentaire sur le rôle des hommes et la façon dont ils sont censés se comporter »
Inès I. étudiante
« Cette pièce nous incite à nous ouvrir au mystère. Elle est pleine de métaphores. Si tu décroches ou t’endors une seconde, tu perds beaucoup de texte. La peur de l’inconnu, de l’autre, de l’étranger, même si l’autre s’offre paumes ouvertes. Les contrastes sont frappants, froideur\chaleur; désir\possession; acheteur\vendeur… ça m’a fait penser à Camus. »
Roberta W, agente de programmation et de recherche en santé publique.
« Pourtant on a besoin de l’autre. Tout au long de la pièce, ils restent à se pousser. On a besoin de faire confiance. Même le personnage qui dit n’avoir besoin de rien a besoin de quelque chose. »
Inès I, étudiante
« Toute la confrontation vient d’idées préconçues et du désir d’obtenir quelque chose qui n’appartient qu’à l’autre, sans y aller directement. »
Lucie M, agente en milieu carcéral
« C’est comme une danse métaphorique des rapports quotidiens entre les humains. »
Roberta W, agente de programmation et de recherche en santé publique.
« Texte très dense sur le commerce [l’échange] ou la mort. Dans la vie, nous sommes constamment en position d’échange. Ça ne marche pas toujours. Ils ont peur de leur vulnérabilité. Si tu n’arrives pas à établir des liens dans ce type d’affrontement, la violence est inévitable d’après la vision de l’auteur »
Danielle B, retraitée.
« On sent la peur de se dévoiler. Ça montre comment l’homme a peur de l’homme et qu’on est souvent en train de négocier plutôt que de s’abandonner et faire confiance. »
Garwood J-G, courtier immobilier
« Je viens du Rwanda, combien de fois des gens viennent vous apporter des choses dont vous n’avez pas vraiment besoin. Cette pièce parle du rapport nord – sud, l’apport nord-sud. Pourquoi on ne demande pas aux pays du sud ce dont ils ont besoin? C’est aussi sur le partage, soit donner et recevoir. Tu penses souvent que tu donnes, mais en vérité tu reçois plus que tu donnes, même si tu es bénévole. Ça touche les valeurs et les relations humaines. Il n’y a ni amour, ni entraide, ni écoute; pourtant, c’est nécessaire sans cela c’est le déni et le crash. »
Jeanne N, intervenante sociale.
« D’ailleurs, ça commence par un combat et cela finit par un combat. J’aurais aimé que cela finisse autrement, mais s’ils s’étaient quittés, chacun s’en allant de son côté, j’aurais trouvé cela encore plus triste parce qu’il n’y avait plus d’espoir. »
Garwood J-G, courtier immobilier
« Mais vaut mieux l’affrontement que rien du tout »
Inès I, étudiante
 
La scénographie et la bande sonore
« S’il y avait eu un décor, cela aurait dérangé notre attention. J’ai même parfois fermé les yeux pour rester attentive au texte. »
Lucie M, agente en milieu carcéral
« La lumière, l’effet du corridor, le no mans land, c’est comme une matrice. Le choc de la fin, c’est comme l’accouchement »
Danielle B, retraitée.
« La lumière crée l’effet de crépuscule, accentue la solitude, rend tout plus obscur. C’est le doute qui s’installe. Le vendeur doute, l’acheteur doute. On espère qu’il y aura compromis, mais il n’y en aura pas »
Jeanne N, intervenante sociale.
« J’ai immédiatement pensé à un ring »
Inès I, étudiante
« C’est comme un espace de jeu, une ligne droite où la violence est sans issue. Ce n’est pas une vision pessimiste que je partage. »
Jeanne N, intervenante sociale.
«Moi, je les imaginais dans une ruelle, une bataille de chats de ruelle. Parfois, je voyais deux scarabées s’affronter dans le désert. »
Lucie M, agente en milieu carcéral
 
L’interprétation
«Texte et interprétations irréprochables» Tous
«Écoutant un texte exigeant comme celui-là, on ne resterait pas sans des acteurs dont le jeu est fantastique»
Danielle B, retraitée.
«L’interprétation est très physique, demande beaucoup d’énergie aux interprètes. On ressentait leur tension tout au long de la pièce. »
Garwood J-G, courtier immobilier
«Ils sont aussi puissants l’un que l’autre»
Lucie M, agente en milieu carcéral
«Pendant tout l’affrontement, le rythme, le ton se maintiennent… Les deux acteurs sont fantastiques. »
Roberta W, agente de programmation et de recherche en santé publique.
«J’avais l’impression qu’ils avaient dans leur personnage autant de pouvoir l’un que l’autre»
Lucie M, agente en milieu carcéral
«Pour moi, le vendeur a plus de pouvoir. »
Inès I, étudiante
«Je crois que dans la vie aussi, il y a toujours un dominateur. J’aimerais bien croire que c’est égal, mais…»
Roberta W, agente de programmation et de recherche en santé publique.
«Ils sont d’autant plus extraordinaires comme acteurs, que pas une seule personne ne vient s’immiscer entre les deux. Au début, c’est assez rationnel comme échange, puis plus ça va plus je me demandais pourquoi s’affronter et se battre. Pourquoi ne pas simplement partir.»
Inès I, étudiante
«… parce que le besoin d’échange est là. D’ailleurs, ce qui nous distingue des animaux, c’est la capacité d’entraide. »
Danielle B, retraitée.
«Ils sont incroyables. On est projeté dans une expérience complexe qui émane des deux. J’y ai reconnu parfois l’accent du sud de la France. Peut-être parce que j’y ai vécu? Je me suis demandé si l’accent français utilisé était là pour donner plus de crédibilité qu’en québécois.»
Inès I, étudiante
«Moi, ça me dérange toujours cet accent français, ça m’éloigne émotivement. J’ai toujours le sentiment que l’on veut me faire la leçon. Et ça me demande beaucoup d’effort pour suivre.»
Lucie M, agente en milieu carcéral
«Moi aussi, ça me fait décrocher et j’ai beaucoup de difficulté avec ça. Je crois que c’est une directive de la metteure en scène parce que ces deux acteurs ne parlent pas comme cela dans la vie. D’autant plus qu’ils sauraient rendre le texte très bien avec leur diction et leur articulation parfaites. On a entendu beaucoup d’acteurs, dont Robert Lalonde par exemple, qui savent dire des textes aussi exigeants et poétiques sans emprunter un français qui n’existe nulle part. »
Danielle B, retraitée.